10 mai 2020

Le coup de faux

Le coup de faux, un coup d'épée dans l'eau


Il a été dit et écrit pendant quelques décennies que l'armée de l'Air avait été annihilée au sol par une attaque éclair des bombardiers allemands, le 10 mai 1940. On sait aujourd'hui que c'est une légende. Néanmoins, il se trouve encore des personnes pour y croire... et colporter, d'une façon ou d'une autre, la rumeur. Un petit retour sur le bilan de ces bombardements s'impose, donc.

Une attaque de masse :

Au matin du 10 mai 1940, c'est l'ensemble des forces aériennes alliées basées sur le continent qui sont visées par l'aviation allemande. Les terrains d'aviation de Belgique, France et Pays-Bas vont donc faire l'objet de l'attention des appareils des escadres de bombardement allemandes. 

En France, ce sont plus d'une quarantaine de site qui sont visés par ces raids "préventifs". Les objectifs sont majoritairement près du front, mais d'autres en sont plus éloignés, comme Avord, Châteauroux - Déol ou encore Lyon - Bron.

Des unités mises sur la touche :

En France, le nombre d'unités mises sur la touche est très faible. En comptant comme pertes sèche tout avion touché, même s'il ne fut qu'endommagé et réparable, les dégâts sont très limités :
  • à Boulogne-Alprecht, l'escadrille de bombardement en piqué AB3 de l'Aéronautique navale est anéantie par un coup au but contre le hangar qui abritait ses 12 Vought V 156F ; le Groupe de chasse II/8 voit également 12 de ses 19 Bloch MB-152 détruits ou endommagés à des degrés divers ;
  • avec 26 de ses 34 appareils touchés, le Groupe de chasse III/2, basé à Cambrai-Niergnies, est également mis hors de combat à la fin de la journée ;
  • le Groupe de reconnaissance II/36 est également durement touché à Neufchâteau : 1/3 de ses Bloch MB-174 sont touchés et près des 3/4 de ses Potez 63-11 ;
  • le Groupe de reconnaissance II/33 perd 50% de ses Potez 63...

Les bombardements de terrains se poursuivent les 11 et 12 mai et permettent la mise hors de combat du Groupes aériens d'observation 2/551 et occasionne des pertes à trois autres... dont deux qui opèrent dans le secteur de la Meuse et des Ardennes !

Sur le terrain d'un groupe de Curtiss H-75, deux mécaniciens regardent le ciel anxieusement
(Figurants : Baptiste Alleaume et Matthieu Joineau de Normandie-Bretagne Reconstitution)

Des résultats faibles :

Cependant, si on rapporte le résultat des destructions, qu'elles soient le fait des bombes allemandes ou des combats aériens pour la défense des aérodromes, le résultat est loin d'être mirobolant (voir tableau ci-dessous). Il n'y a que pour le bombardement où cela pourrait être inquiétant puisque les effectifs sont déjà faibles.

Source : tableau établi d'après les données disponibles dans les ouvrages indiqués en sources. Il ne prend en compte que les unités des Zones d'opération aériennes Nord, Est et Sud.


Concernant l'aviation britannique déployée en France, les pertes sont également très faibles avec seulement 17 appareils détruits ou endommagés ! En réalité, l'attrition proviendra majoritairement des ponctions occasionnées par la chasse et la DCA allemandes, lors des bombardements des troupes.

Conclusion :

Le grand coup de faux voulu par les Allemands n'a donc pas été. En effet, les aviations françaises et britanniques sont loin d'avoir été anéanties par les bombardements de leurs terrains. C'est plus le cas des aviations belges et néerlandaises, même si leurs "forces aériennes de coopération avec l'armée de Terre" ont relativement peu souffert. Néanmoins, l'armée de l'air allemande s'est déjà montrée efficace en Belgique dans l'appui et la protection des troupes au sol. C'est une composante qui fera bien défaut aux aviations alliées... et si les bombardiers allemands n'étaient majoritairement pas escortés ce 10 mai, ce ne sera plus le cas les jours suivants !


La tenue présentée :

 
 Zoom sur l'uniforme en drap des hommes de troupe de l'armée de l'Air :

Casquette Mle 1929 avec insigne brodé "aurore" ;

Chemise Mle 1935 bleue avec cravate régate Mle 1935 (qui devrait être noire) ;

Manteau Mle 1939 gris de fer foncé à une rangée de bouton ;

Ceinturon modèle SOC noir ;

Pantalon Mle 1936 gris de fer foncé ;

Brodequin SOC Mle 1919 noirs.

Uniforme  : Collection de Maxime Dubois (Max Suplus militaire)



Romain Lebourg
Administrateur de la Section Air du Collectif France 40
Membre de France 40 reconstitution et Normandie-Bretagne reconstitution

Sources :

  • Collectif, le Morane-Saulnier 406, Coll. Histoire de l'aviation n°5, éd. Lela Presse 1998-2003
  • Cornwell Peter, The battle of France then and now, éd. After the battle, 2007
  • Ehrengardt Christian-Jacques, 10 mai 1940 Blitzkrieg - le jour où le ciel nous a foudroyés, in Aérojournal n°15 avril-mai 2020
  • Johanne Serge, Le Bloch MB-152, coll. Histoire de l'avitaion n°13, éd Lela Presse 2003
  • Persin Lionel, Les Curtiss H-75 de l'armée de l'Air, coll. Histoire de l'viation n°22, éd Lela Presse 2008
  • Ribeiro Jérôme et Ledet Michel, L'Amiot 143 - de l'Amiot 140 à l'Amiot 150, coll. Profils Avions n°18, ed Lela Presse 2013
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